La situation est tendue, les esprits échauffés. Au CRIC, nous voyons le dialogue comme une fenêtre qu’on ouvre pour faire entrer de l’air — pas pour regarder la poussière tourner. La vraie question n’est pas « dialogue ou pas », mais quel dialogue, avec qui, pour quoi, et sous quelles garanties. Sans drapeau partisan, avec bon sens citoyen, ce point de vue propose une boussole simple où la diaspora est une énergie qui relie : connecter les forces du dehors aux espoirs d’ici — avec un brin d’humour pour respirer.
Il y a des jours où le pays ressemble à une pièce mal ventilée : on ouvre les fenêtres ou on étouffe.
Au CRIC, nous partons d’une idée simple : le dialogue est une fenêtre. On l’ouvre pour faire entrer de l’air — pas pour regarder la poussière tourner. Dans la tension actuelle, la question n’est pas « dialogue ou pas », mais quel dialogue, avec qui, dans quel but, et sous quelles garanties ? Ce point de vue est citoyen et civique, non partisan : il cherche l’efficacité, pas l’étiquette.

1) Pourquoi reparler de “dialogue” quand tout le monde est à cran ?
Parce que, dans les moments d’énervement collectif, parler utile évite souvent de se parler avec les poings. L’histoire montre que des conversations publiques bien tenues peuvent réduire la violence, remettre des règles sur la table et rouvrir des issues.
À l’inverse, les “faux dialogues” créent l’effet salle d’attente : on patiente, on s’épuise, on se fâche encore plus… puis on recommence.
Moralité : le dialogue n’est ni baguette magique ni gros mot. C’est un outil. Une clé bien utilisée dévisse l’écrou ; mal utilisée, elle arrondit la tête et on ne peut plus rien ouvrir.
Clin d’œil : si le “dialogue” ressemble à une réunion où l’on repart sans savoir qui fait quoi, quand et comment on le vérifiera, ce n’était pas un dialogue — c’était du karaoké.
2) Ce que l’on apprend du monde (sans donner de leçons)
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Afrique du Sud – Commission Vérité et Réconciliation : parole aux victimes, faits documentés, reconnaissance publique. Leçon : un dialogue crédible met les faits sur la table et reconnaît les torts au grand jour.
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Tunisie – “Quartet” du dialogue national (Prix Nobel 2015) : la société civile a tenu le fil quand tout menaçait de rompre. Leçon : organisations citoyennes et corps intermédiaires peuvent servir de pont quand les camps politiques ne se parlent plus.
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Irlande du Nord – Accord du Vendredi Saint : partage de pouvoir, institutions claires, mécanismes pacifiques pour les désaccords. Leçon : un cadre solide définit les règles du jeu et tient dans le temps.
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Colombie – Accord de paix : processus contesté puis ratifié après révisions. Leçon : même bousculé, un chemin transparent et amendable peut atterrir et sauver des vies.
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Partout – Assemblées citoyennes : quand elles sont bien conçues et suivies d’effets, elles calment les débats explosifs et produisent des recommandations équilibrées. (À condition que les autorités répondent vraiment.)
Fil rouge : inclusion réelle, règles claires, transparence, délais, et surtout suivi après coup. Sans cela, on appelle ça “un micro branché sur le vide”.
3) Dialogue « utile » vs. dialogue « décoratif » : la boussole CRIC
Utile quand il :
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Éclaire les faits (documents accessibles, synthèses lisibles) ;
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Inclut vraiment citoyens, femmes, jeunes, corps intermédiaires et experts indépendants (diaspora comprise) ;
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Fixe des objectifs concrets et datés (dans 30, 60, 90 jours, on livrera X, Y, Z) ;
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Prévoit le suivi (qui vérifie ? qui publie ? que se passe-t-il si ça déraille ?) ;
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Assure l’équité (temps de parole, droit de réponse, médiation connue d’avance).
Décoratif quand il :
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remplace les décisions par des commissions sans fin,
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exclut ou intimide des parties prenantes,
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noie les citoyens sous des documents illisibles,
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oublie l’après (zéro plan de mise en œuvre, zéro reddition de comptes).
4) « Et si le contexte est trop tendu ? » — Trois réponses de bon sens
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Sécuriser l’espace civique : liberté d’expression, sécurité des participants, pluralisme des voix. Sans ces garanties minimales, un “dialogue” n’est qu’un examen de passage.
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Choisir un format proportionné : du tour de table local à la concertation nationale, l’essentiel est d’avoir un but clair, des règles publiques et une réponse aux propositions.
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Publier ce qui est décidé — puis le faire : la transparence est une assurance-vie de la confiance. Sans publication et sans retour aux citoyens, même la meilleure conversation se dissout.
5) Rôle de la diaspora (dans l’esprit CRIC)
La diaspora n’est pas un public lointain : c’est une énergie distribuée. Elle apporte contre-expertise, médiation et comparaisons utiles ; parfois des réseaux, parfois des moyens. Elle n’ordonne pas : elle relie, elle écoute, elle documente. Deux oreilles, un carnet d’adresses… et, quand le débat s’éternise, un chargeur pour ne pas couper la discussion au pire moment.
Conclusion (impact)
Le pays a besoin d’air — pas d’air du temps. Un dialogue est juste s’il rend la vie des citoyens plus respirable : des faits clarifiés, des décisions compréhensibles, des échéances tenues, des comptes rendus publics.
C’est tout l’esprit du CRIC : une culture de preuve, d’inclusion et de responsabilité. Ouvrons les fenêtres, remettons les choses à hauteur d’humains, et gardons une règle simple : un bon échange ne sert pas à gagner une joute, mais à faire reculer la peur, la confusion et l’injustice.
Et s’il faut un peu d’humour pour tenir le cap : souvenons-nous que le karaoké est une fête… pas une méthode de gouvernement.

— Didier Jean YEMBA
Secrétaire Exécutif Général du CRIC