Introduction à la tribune de Pascal KABITSHWA
Et si l’écologie devenait l’arme silencieuse d’une révolution citoyenne ?
Dans cette tribune lucide et percutante, Pascal Kabitshwa, membre fondateur du CRIC-Canada, dresse un réquisitoire sans détour contre l’abandon de l’environnement en RDC – et appelle à faire de l’engagement écologique un pilier de la souveraineté populaire.
S’appuyant sur la Constitution congolaise (articles 53 et 202), il dévoile les incohérences d’une gouvernance incapable de défendre les droits fondamentaux des citoyens à un environnement sain. Mais plus qu’un constat d’échec, cette tribune est un manifeste d’action : législation anti-plastique, éducation écologique, innovation verte, justice environnementale… autant de chantiers que le CRIC entend porter, avec et pour le peuple.
Une lecture urgente pour toutes celles et ceux qui refusent que Kinshasa devienne le symbole mondial de l’abandon écologique.
👉 Une seule voie : former, éveiller, agir. Et reconstruire le pays par en bas.
« La nature est patiente, mais elle ne pardonne pas l’ignorance organisée. »
En ce 5 juin, Journée mondiale de l’environnement, le temps n’est plus aux discours vides. Il est venu d’ausculter, avec lucidité, le lien entre notre effondrement écologique et notre faiblesse citoyenne. Car il ne s’agit pas simplement de forêts abattues ou de cours d’eau pollués — mais d’un abandon systématique de notre devoir de défense du bien commun.
La Constitution de la République Démocratique du Congo est pourtant sans ambiguïté. Son article 53 stipule que :
« Toute personne a droit à un environnement sain et propice à son épanouissement intégral. La personne a le devoir de le défendre. L’État veille à la protection de l’environnement et à la santé des populations. »
Cet engagement fondamental est renforcé par l’article 202 qui inscrit l’environnement parmi les compétences concurrentes entre le pouvoir central et les provinces. Ce choix constitutionnel aurait dû permettre une co-responsabilité dynamique et structurée. Mais qu’en est-il aujourd’hui ? Une gouvernance défaillante, une corruption endémique, et une inaction chronique ont vidé ces articles de leur substance.
« L’Afrique paiera cher son manque de conscience écologique si elle continue à copier les modèles destructeurs venus d’ailleurs. » – Thomas Sankara
Le tableau congolais est sombre : l’accumulation des déchets plastiques, la pollution des rivières, l'exploitation incontrôlée des forêts, l’urbanisation anarchique, ou encore l’inaction politique transforment des villes comme Kinshasa en décharges à ciel ouvert — à tel point que le surnom « Kin-la-poubelle » est devenu tristement courant.
Mais il est encore temps de rompre avec cette dérive. Le CRIC – Contrat Républicain d’Innovation Civique – affirme ici son rôle : éveiller, former, mobiliser. Non pas comme un mouvement moraliste de plus, mais comme un espace de refondation civique où la lutte écologique devient un levier stratégique pour une souveraineté durable.
Nous appelons à une approche top-down, mais enracinée, qui articule politique, innovation et engagement citoyen autour de sept piliers concrets :
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L’interdiction légale de l’usage abusif du plastique, par une législation claire et applicable ;
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La promotion de l’ingénierie biologique et de l’innovation verte, adaptée aux réalités locales ;
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L’intégration de l’intelligence artificielle (IA) pour la détection, le suivi et la prévention des pollutions ;
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Le leadership des jeunes et le bénévolat écologique, comme leviers de transformation intergénérationnelle ;
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L’éducation environnementale nationale, dès le primaire, pour forger une conscience écologique ;
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Le développement d’un green business local, durable, inclusif et connecté aux besoins communautaires ;
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La création d’un tribunal environnemental indépendant, garant de l’effectivité du droit constitutionnel.
Comme le disait Wangari Maathai, prix Nobel de la paix :
« Ce sont les petits actes quotidiens qui font une grande différence. C’est ainsi qu’un colibri éteint l’incendie, goutte après goutte. »
Aucune politique ne pourra réussir dans un contexte où la population est maintenue dans l’ignorance, la passivité ou la résignation. Voilà pourquoi nous croyons, au CRIC, que l’éducation civique est la condition sine qua non d’une écologie populaire.
L’écologie n’est pas un luxe d’ONG internationales. C’est une urgence populaire. C’est le front invisible où se joue notre dignité collective. Refuser de jeter des ordures, exiger des politiques publiques efficaces, planter des arbres, protéger nos rivières : tout cela relève d’un même acte fondateur – se réapproprier notre citoyenneté.
Ce 5 juin, nous n’appelons pas à une commémoration. Nous lançons un appel à l’action, à la co-responsabilité, à l’innovation civique. Ensemble, libérons la RDC de la pollution plastique, de l’inaction institutionnelle, et de l’abandon du bien commun.
Ingénieur Pascal Kabitshwa, M.A., Msc
Spécialiste en politiques environnementales,
changement climatique et gestion des ressources naturelles.
= CRIC-Canada =
